Selon le «Larousse», l’inflation est un déséquilibre économique caractérisé par une hausse générale des prix et par l’accroissement de la circulation monétaire. Pour Salama P. et Valier J., « L’inflation se développe librement, modifiant la structure des prix relatifs et par là même s’auto-alimentant ». G. Olive refuse d’associer la définition de l’inflation à un mécanisme inflationniste particulier. Pour lui, l’inflation est (donc) : (1) la hausse du niveau général des prix (et non la hausse du prix de quelques produits); (2) Un phénomène auto-entretenu de hausse des prix (une hausse en entraîne d’autres) et non un phénomène isolé et accidentel ; (3) Une hausse des prix fondé sur des mécanismes macro-économiques (mettant en jeu l’interdépendance, entre toutes les parties et tous les mécanismes de l’économie: répartition,formation des prix, systèmes de distribution).
Types d’inflations
Sumata Claude distingue trois types d’inflation:
(1) « L’inflation larvée concerne l’étape où les accroissements des prix sont accidentels. A ce stade, la hausse des prix reste en deçà de la progression de la masse monétaire et les phénomènes de spéculation résultant limités;
(2) l’inflation ouverte se caractérise par des anticipations de hausse des prix permanents de la part des agents économiques, alimentant des mécanismes de spéculation et de fraude, les encaisses réelles subissent dès lors une évolution majeure car le mouvement à la hausse des prix dépasse la progression des variables monétaires nominales;
et (3) l’inflation galopante ou hyperinflation est dominé par des hausses des prix exponentielles, provoquant la fuite devant la monnaie nationale ».
A un tel stade, le recours aux encaisses monétaires nationales devient limité alors que l’usage de substitutions ou valeurs refuge se généralise. On assiste dès lors à la baisse des encaisses réelles et les anticipations de l’inflation provoquent des ajustements fréquents par rapport au prix dans les prévisions des agents économiques. Ainsi peut-on affirmer que l’hyperinflation, dans le langage courant, est une hausse extrêmement forte, accompagnée d’un effondrement de la valeur de la monnaie. D’après CAGAN (1956), « L’hyperinflation représente une situation chaotique commençant le mois où la hausse des prix dépasse 50 % et finissant le mois avant que l’accroissement mensuel des prix ne descende à un niveau inférieur à ce seuil pour s’y maintenir pendant au moins un an ». Il précise par la suite que le taux de croissance mensuelle des prix ne reste pas continuellement au dessus de 50 % pendant toute la durée de l’hyperinflation.
Salama P. et Valier J. définissent l’hyperinflation de la manière suivante : « (1) la hausse des prix devient, à la fois, exponentielle, incontrôlable et imprévisible; (2) les prix relatifs perdent de plus en plus leur cohérence, ce qui alimente l’accélération même de la hausse des prix; (3) la monnaie nationale perd de plus en plus l’exercice de ses fonctions essentielles: fonction de réserve de valeur et d’unité de compte d’abord, puis aussi, sur une plus ou moins grande échelle, fonction de moyen de circulation qui sera exercé par une monnaie étrangère, en l’occurrence le plus souvent le dollar ». L’hyperinflation rampante se manifeste «par une perte partielle, mais importante, par les monnaies nationales de leurs fonctions de monnaie, par une vive accélération de la hausse des prix et par une non-cohérence grandissante des prix relatifs». L’hyperinflation ouverte se caractérise «par une hausse des prix exponentielle, incontrôlée –le gouvernement ayant perdu toute maîtrise de la situation -, imprévisible; les agents ayant perdu tout moyen de prévoir la hausse du mois à venir, voire de la semaine ou du jour».
Ce phénomène est souvent illustré par le passage ou l’accélération de l’inflation à 2 chiffres, à l’hyperinflation rampante à 5 chiffres ou plus. Donc, la situation d’hyperinflation ouverte est une situation de perte générale du contrôle des prix,d’effondrement des approvisionnements. Mais, comme l’ont souligné SALAMA et VALIER : « La frontière est relativement floue entre l’hyperinflation rampante et l’hyperinflation ouverte ».
Moyens d’appréhender le phénomène inflationniste
Tous les courants économiques s’accordent au moins sur un point : la meilleure façon d’appréhender le phénomène inflationniste consisterait à identifier les sources de l’inflation et les moyens de les combattre. Mais après, les analyses diffèrent selon la conception du courant (économique) auquel l’on appartient. Comme l’a indiqué Sumata, « L’appréhension du processus hyperinflationniste semble dominée par les thèses monétaristes présentant le phénomène essentiellement sous l’angle quantitatif. Cependant l’hypothèse d’exogénéité de l’offre de monnaie, selon la Banque Centrale, détermine unilatéralement le taux de croissance monétaire, notamment celui de la base, demeure peu probable dans l’engrenage hyperinflationniste. En effet, la persistance des déficits budgétaires est généralement à la base de la politique monétaire laxiste du gouvernement. Les émissions de monnaie successives sont censées couvrir le déficit du budget public ». Les mécanismes d’accroissement cumulatif des prix traduisent l’incapacité de l’État à maintenir l’équilibre des finances publiques. Les échecs du courant monétariste dans la lutte anti-inflationniste – en Amérique latine, comme dans les autres pays en développement – peuvent s’expliquer d’une part, par l’uniformité des remèdes préconisées, et d’autre part par une non-prise en compte des réalités intrinsèques des économies ajustées.
L’inflation a souvent diverses origines (internes ou externes). Ses causes, et «les courroies de transmission», tout comme son effet sur certaines variables macro-économiques (croissance, déficit budgétaire, baisse du taux d’investissement productif, conflits distributifs) varient grandement selon le pays concerné. L’expansion de la masse monétaire est souvent l’argument premier mis en avant par la plupart d’analyses de l’inflation, ce qui est certes, mais en partie seulement, vrai. En effet, comme l’a montré GALBIS, l’inflation ne peut persister à moyen et à long terme sans une expansion monétaire, mais il suffit de procéder à une analyse concrète pour se rendre compte que: «Le phénomène inflationniste est provoqué, affecté et transmis par bien d’autres facteurs, tant intérieurs qu’extérieurs, qui peuvent varier d’un pays à l’autre et d’une époque à l’autre au sein d’un même pays». Ainsi, l’ampleur de l’inflation sur la croissance par exemple, dépendra de la manière dont réagit le pays concerné. Il est souvent observé qu’une politique expansionniste du crédit et une détérioration des taux de change sont souvent à l’origine de la transmission des facteurs intérieurs (tels que les hausses de salaires, les prix subventionnés et le déficit du secteur public) et des facteurs extérieurs (tels que l’évolution des prix des importations).
Quel que soit le type de pays, une chose est pourtant sûre: l’inflation, comme l’a montré GALBIS dans son étude latino-américaine, «Freine la croissance de ces pays; du fait de son incidence sur certains prix relatifs déterminants au niveau macro- économiques tels que les termes de l’échange, les taux d’intérêts réels et le coût des salaires».
Références
- Salama P. et Valier J., L’économie gangrénée, p. 7
- G. OLIVE, in Dictionnaire économique et social (J. Bremond et A. Gélédan), Ed. Hatier, juin 1990, p. 206.
- CAGAN P., The monetary dynamic of hyperinflation, in M. FRIEDMAN, Ed. Studies in the Quantity Theory of Money, Chicago University Press, 1956, p. 17.
- Vicente Galbis, L’inflation: l’expérience latino-américaine 1970-1979, in Finances et Développement, Septembre 1981, Vol. 12, p. 22.