En RDC, la gratuité telle que voulue par le président Tshisekedi induit inexorablement une baisse de revenus des enseignants, largement sous payés par l’Etat mais qui se rémunéraient en mettant à contribution les parents. En imposant la gratuité, le pouvoir congolais n’a pas amélioré le salaire des enseignants (souvent impayés) qui, par ailleurs se retrouvent désormais face à des classes encore plus bondées que par le passé. Intenable pour nombre d’enseignants qui sont donc partis en grève pour exiger une revalorisation de leurs salaires. Bien entendu, personne ne songerait évidemment à critiquer la décision politique de garantir la gratuité de l’enseignement mais à condition évidemment de prévoir les modalités pour celle-ci devienne réalité.
Une situation jamais prise en compte par les décideurs politiques qui a débouché il y a trois semaines sur un large mouvement de grève qui pénalise les enfants. Trois semaines de grève. Trois semaines que les étudiants congolais sont privés de cours. Des étudiants qui se retrouvent devant des portes closes et qui ont décidé ce jeudi 21 octobre de sensibiliser les députés nationaux à Kinshasa en manifestant bruyamment jusqu’à l’intérieur du parlement ou, comme dans le nord Kivu, de descendre dans la rue pour dire leur lassitude face à ce mouvement.
Gratuité de l’enseignement public primaire
Avant cette rentrée, des syndicats d’enseignants dans plusieurs provinces avaient annoncé leur intention de se mettre en grève pour réclamer de meilleures rémunérations. Le ministre de l’Enseignement primaire, secondaire, et technique (EPST), Tony Mwaba, a dernièrement menacé de rayer les enseignants grévistes de la liste de paie. Ce bras de fer intervient au moment où de nombreux défis se posent sur la gratuité de l’enseignement primaire public, projet phare du président Félix Tshisekedi lancé en septembre 2019. Le coût de cette gratuité est évalué à quelque 2,64 milliards de dollars par an par des experts du gouvernement, ce qui est immense pour le budget de la RDC (près de 7 milliards de dollars en 2021 mais jamais totalement mobilisés).
Un déficit de planification
« La gratuité de l’enseignement, programme-phare du quinquennat de Félix Tshisekedi, souffre d’un déficit de planification« , a réagi le mouvement citoyen Lutte pour le changement (Lucha). « Le gouvernement doit urgemment pallier à ce déficit. En attendant, il doit négocier avec les syndicats des enseignants des mesures transitoires idoines pour sauver la nouvelle année scolaire. Il ne doit surtout pas être question de redemander aux parents de payer« , ajoute ce mouvement pro-démocratie.
Mary-Queen Bugandwa.