Constitutions de la République Démocratique du Congo de l’État Indépendant du Congo à nos jours

(1) Loi sur le gouvernement du Congo Belge du 18 octobre 1908. Publiée au Bulletin Officiel du Congo Belge de 1908, la loi sur le Gouvernement du Congo Belge, appelée la Charte coloniale a régi, en tant que texte constitutionnel, la RDC, alors colonie du Royaume de la Belgique, du 18 octobre 1908 au 30 juin 1960. Sous la Charte coloniale, le Congo Belge avait une personnalité distincte de celle de la métropole (la Belgique) et était régi par des lois particulières. Elle organisait distinctement les droits des belges, des étrangers et des indigènes dans le territoire de la RDC. L’exercice du pouvoir législatif était de la compétence du Roi de la Belgique qui agissait par voie des décrets. Ces décrets étaient pris par le Roi sur la proposition du Ministre des colonies. La délégation du pouvoir législatif était interdite. Le même Roi exerçait le pouvoir exécutif par voie des règlements et d’arrêtés. Il était représenté dans la colonie par un Gouverneur général, assisté d’un ou de plusieurs Vice-gouverneurs généraux.

Le Gouverneur général et, dans les territoires constitués par le Roi en Vice-Gouverneur général, les Vice-gouverneurs généraux, exerçaient, par voie d’ordonnances, le pouvoir exécutif que le Roi leur déléguait. La justice civile et la justice militaire étaient organisées dans la colonie du Congo Belge par décret du Roi. Elle était rendue et les décisions judiciaires étaient exécutées au nom du Roi. La Charte coloniale organisait le rôle du Ministre des colonies, qui était nommé et révoqué par le Roi. Elle organisait, par ailleurs, le Conseil colonial lequel était présidé par le Ministre de Colonie. Composé d’un président et de 14 conseillers, le Conseil colonial délibérait sur toutes les questions que lui soumettait le Roi et était consulté par ce dernier sur tous les projets de décrets. Enfin, le traité concernant la Colonie était fait par le Roi en se référant à l’article 68 de la Constitution belge du 7 février 1831 tandis que le Ministre des affaires étrangères du Royaume de Belgique avait dans ses attributions des relations de la Belgique avec les puissances étrangères au sujet de la Colonie.

(2) Loi fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo  Au début de l’année 1959, à la suite de troubles graves mettant en cause le régime colonial, le gouvernement belge accepte le principe de l’indépendance. La date de l’indépendance est bientôt fixée au 30 juin 1960. Une loi fondamentale est alors élaborée par le Parlement belge pour servir de cadre juridique provisoire, avant l’adoption d’une Constitution rédigée par les Congolais eux-mêmes. Mais le Parlement belge élabore un système fédéral complexe, avec une dyarchie au sommet entre le président de la République et le Premier ministre. Or, dès la proclamation de l’indépendance, les Congolais sont aux prises avec rébellions militaires, gouvernements insurrectionnels et sécessions régionales, notamment celle du Katanga, ou tribales. Le 5 septembre, le président de la République Kasa-Vubu, et le premier ministre, Patrice Lumumba se destituent réciproquement, et quelque jours plus tard, le 14 septembre 1960, le premier coup d’État de Mobutu, alors chef de l’armée, tranche en faveur du président de la République.

Cette loi fondamentale de 1960, est alors complétée, par les décrets-lois constitutionnels qui confient la totalité du pouvoir central au président de la République Kasa-Vubu. Selon le premier décret-loi, le Parlement est suspendu et le gouvernement est remplacé par un Conseil des commissaires généraux, présidé par J. Bomboko ; selon le deuxième, les garanties d’indépendance du pouvoir judiciaire sont suspendues ; et selon le troisième, le conseil des commissaires généraux est remplacé par un gouvernement provisoire nommé par le président et qui exerce le pouvoir législatif. Ce régime provisoire fonctionne tant bien que mal jusqu’à ce que l’action des troupes de l’ONU permette de reprendre le Katanga. Mais quelques mois plus tard, c’est Moïse Tshombé, l’ancien président du Katanga, qui devient premier ministre du Congo, à l’issue d’une brève réconciliation avec Kasa-Vubu et le général Mobutu, qui permet l’adoption de la Constitution de Luluabourg en 1964.

(3) Constitution du 1er aout 1964 (Constitution de Luluabourg). Le Congo belge obtient son indépendance le 30 juin 1960. Immédiatement, tentatives de sécession (Katanga), rébellions militaires, gouvernements insurrectionnels se succèdent et le régime établi par la loi fondamentale du 19 mai 1960 est inapplicable. Un régime provisoire fondé sur des décrets-lois attribue formellement tous les pouvoirs au président de la République. Tandis que les Casques bleus de l’ONU tentent de remettre de l’ordre, le premier ministre Lumumba, puis le secrétaire général de l’ONU, Hammarskjoeld sont tués. L’arrivée au pouvoir central de Moïse Tshombé, le dirigeant du Katanga, permet la rédaction de la Constitution de Luluabourg, ci-dessous, qui établit un régime fédéral censé donner satisfaction aux aspirations des régions à l’autonomie. Mais, rapidement, la rivalité entre le président de la République et le premier ministre incite le chef de l’armée, Mobutu, a prendre directement le pouvoir, le 24 novembre 1965 et à fonder une IIe République, qui sera dotée d’une Constitution le 24 juin 1967.

(4) Constitution de la IIe République du 24 juin 1967 (Moniteur Congolais, n°14 du 15/07/1967, p. 564). La Constitution de 1964, qui établissait un régime fédéral, est rapidement victime des querelles au sein du pouvoir central entre le président de la République et le premier ministre. Mobutu, le chef de l’armée, prend le pouvoir, le 24 novembre 1965. La IIe République est dotée d’une Constitution le 24 juin 1967. Celle-ci établit un régime unitaire, avec une présidence forte et un dispositif n’autorisant que deux partis politiques pour limiter la virulence des luttes politiques. La Constitution a fait l’objet de 17 lois de révision, parmi lesquelles trois retiennent l’attention: (1) la révision de 1970 établit le parti unique ; (2) la loi du 15 août 1974 a pour but de «consacrer le Mobutisme comme doctrine du Mouvement populaire de la Révolution». En fait, il s’agit d’une nouvelle Constitution, qui consacre la dictature de Mobutu, sous prétexte d’authenticité africaine: Léopoldville est devenu Kinshasa, le Congo devient le Zaïre, et Joseph Mobutu est maintenant Mobutu Sese Seko Kuku ; (3) enfin la loi n °90-008 du 25 novembre 1990 qui introduit le multipartisme intégral et ouvre la voie à la transition démocratique exigée par l’opposition.

(5) Acte constitutionnel de la Transition du 09 avril 1994 (Journal officiel de la République du Zaïre (35e année), n° spécial, avril 1994). La IIe République, avec la Constitution du 24 juin 1967 et ses révisions de 1970 et de 1974 avait établi un régime de parti unique et, en fait, la dictature de Mobutu. Ce régime s’applique jusqu’au mouvement de contestation des années 1990, qui débouche sur une période de transition prolongée, inaugurée officiellement par le discours prononcé le 24 avril 1990 par le président Mobutu et, juridiquement, par la loi de révision constitutionnelle du 25 novembre 1990 autorisant le multipartisme, puis par la convocation, le 11 avril 1991, d’une Conférence nationale dite Conférence nationale souveraine (CNS). L’acte du 4 août 1992 est fondé sur le Compromis politique global, signé le 31 juillet précédent par les différentes composantes de la CNS et par les représentants du président Mobutu. Il prive celui-ci d’une grande partie de ses attributions et établit un régime parlementaire. Mais il n’a jamais été promulgué par Mobutu ni publié au Journal officiel et Mobutu fait immédiatement rédiger un texte concurrent, qui est adopté par l’Assemblée nationale, en principe remplacée par le Haut Conseil de la République : la loi du 2 avril 1993 portant Acte constitutionnel harmonisé.

Cette loi accorde à Mobutu des prérogatives essentielles, comme la nomination du premier ministre, et confirme le régime parlementaire, mais au profit de l’Assemblée nationale qui est rétablie dans sa fonction législative et reçoit le pouvoir de censurer le Gouvernement, tandis que le Haut Conseil de la République ne joue plus qu’un rôle secondaire. Pour tenter de mettre fin à l’imbroglio résultant de l’existence de ces deux textes, soutenus par deux assemblées aux tendances opposées, un troisième Acte constitutionnel est promulgué le 9 avril 1994, et un Arrangement particulier est conclu le 16 juin 1994 entre la présidence et l’opposition. Ce nouvel Acte constitutionnel établit un compromis entre les deux tendances politiques. Le nom de Zaïre est confirmé, les membres des deux assemblées en lutte forment une chambre unique; le pouvoir exécutif est partagé, non sans confusion, entre le président de la République et le premier ministre, qui est choisi par l’opposition. Mais la situation demeure confuse jusqu’à l’effondrement du régime et la fuite de Mobutu, le 16 mai 1997, devant l’avancée des forces de Kabila, alors soutenu par le Rwanda et l’Ouganda, qui tente d’imposer son autorité et de fonder un nouveau régime.

(6) Décret-Loi constitutionnel No. 003 du 27 mai 1997 relatif à l’organisation et à l’exercice du pouvoir en République Démocratique du Congo, promulgué le 28 mai 1997. L’interminable et confuse transition démocratique qui se poursuivait à Kinshasa depuis 1990 prend brutalement fin lorsque le 21 mai 1997, Laurent-Désiré Kabila entre à Kinshasa que Mobutu vient de quitter, mourant, pour se réfugier au Maroc. Les forces de Kabila soutenues alors soutenues par l’Ouganda et le Rwanda ont traversé le pays d’est en ouest, tandis que les troupes de Mobutu reculaient et se débandaient. Le président Mandela avait réuni Mobutu et Kabila, le 4 mai 1997, pour mettre fin aux combats. Mais le nouveau président concentre dans ses mains le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, tandis que la rédaction d’une nouvelle Constitution se fait attendre. En fait, une nouvelle période de conflit commence pour le Zaïre redevenu Congo, provoquant plus de 4 millions de morts. Le nouveau président Kabila doit lutter contre diverses factions armées et contre ses anciens alliés, le Rwanda et l’Ouganda, mais il reçoit alors le soutien de l’Angola. Kabila est assassiné le 16 janvier 2001, et son fils lui succède à la tête du Congo. La médiation du président sud-africain Thabo Mbeki facilite la tenue d’un Dialogue intercongolais à Sun City en 2002 et la conclusion d’un Accord global et inclusif sur la transition en République Démocratique du Congo, signé le 17 décembre 2002. L’accord porte notamment sur la Constitution de la Transition qui est promulguée le 4 avril 2003.

(7) Constitution de la transition du 4 avril 2003, tel que prévu par l’Accord global et inclusif sur la transition en République Démocratique du Congo, signé le 17 décembre 2002 et adopté à Sun City le 1er avril 2003. La victoire des forces dirigées par Laurent-Désiré Kabila en mai 1997 (avec la fuite puis la mort du dictateur Mobutu) avait rapidement conduit à un nouveau conflit. Le nouveau président qui concentre entre ses mains les pouvoirs exécutif et législatif, doit lutter contre diverses factions armées et contre ses anciens alliés, le Rwanda et l’Ouganda, mais il reçoit alors le soutien de l’Angola. Kabila est assassiné le 16 janvier 2001, et son fils lui succède à la tête du Congo.

La médiation du président sud-africain Thabo Mbeki facilite la tenue d’un Dialogue intercongolais à Sun City en 2002 pour mettre fin à la longue guerre du Congo/Zaïre qui aurait provoqué plus de 4 millions de morts, puis la conclusion d’un Accord global et inclusif sur la transition en République Démocratique du Congo, signé le 17 décembre 2002 et adopté à Sun City le 1er avril 2003. L’accord porte notamment sur la Constitution de la Transition qui est promulguée le 4 avril. Ce texte est caractérisé par la formule 1+4, c’est-à-dire que le pouvoir exécutif est partagé entre le président de la République et 4 vice-présidents, tandis que deux assemblées détiennent le pouvoir législatif, cinq institutions d’appui à la démocratie (articles 154 à 160) complétant un dispositif dans lequel les décisions sont prises par consensus. Ce système a permis d’apaiser les relations sociales et favorisé la mise en place d’une nouvelle Constitution, dite de la IIIe République en 2006.

(8) Constitution de la IIIe République, telle que acceptée par référendum les 18 et 19 décembre 2005 et promulgué le 18 février 2006. Après une période de transition d’une durée exceptionnelle, marquée par l’échec final de la Conférence nationale souveraine, après deux projets de Constitution rejetés par Mobutu, l’arrivée au pouvoir de Laurent Désiré Kabila, par la force des armes, le 17 mai 1997, une guerre d’agression près de dix ans, poursuivie jusqu’en 2005, et prolongée par des violences sporadiques, et finalement la médiation sud-africaine, un accord global fut signé à Pretoria le 17 décembre 2002, permettant la mise en place de nouvelles institutions de transition, qui devaient à leur tour donner naissance à un projet de Constitution accepté par référendum les 18 et 19 décembre 2005 et promulgué le 18 février 2006. Cette Constitution de 2006 a été révisée par la loi 11/002 du 20 janvier 2011, qui a modifié les articles 71, 110, 126, 149, 197, 198, 218 et 226.

(9) Constitution de la IIIe République, telle que modifiée par la Loi n° 11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006.

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